
NOLWENN ARZEL
présentation du projet de recherche/création master
Dans le sillage du mouvement interceltique dont elle fut l’un des fers de lance la harpe dite celtique est rapidement choisie comme le symbole idéal et idéalisé d’une celtitude fantasmée. C’est ainsi qu’elle fait son apparition à la charnière du XVIIIème et du XIXème siècle. Né du terreau romantique elle se glisse entre les doigts du roi David dans l’Ossian de l’Ecossais Mac Pherson et on la croise systématiquement dans les mouvements néo druidiques gallois. C’est par ce biais que des intellectuels bretons tels Hersart de La Villemarqué ou Gildas Jaffrenou vont par leurs échanges avec ces courants d’outre-manche ramener la petite harpe qui deviendra notre harpe celtique. Pour autant il faudra attendre les années 50 et l’idée un peu folle d’un inventeur aussi fertile que génial, Jorg Cochevelou pour ouvrir une dynamique qui emportera tout sur son passage et que l’on connaît désormais sous le nom de « Revival ». Jorg Cochevelou décide de construire une harpe « celtique » pour son fils futur Alan Stivell. L’enfant fasciné ne quittera plus jamais l’instrument et le phénomène Stivell sera amorcé. A partir de là l’engouement pour l’instrument et toute la charge symbolique, politique, sociétal qu’il véhicule ne se démentira pas. On veut en jouer. On veut apprendre. La lutherie se développe. Les premiers professeurs se font jour presque malgré eux et sans aucun modèle comme le témoigne merveilleusement Marrianig Larchantec dans son ouvrage « La harpe, instrument des celtes ». Ce renouveau de la musique bretonne est sans doute une des périodes les plus excitante de son histoire tant dans la diversité que dans la qualité de ses productions, mais aussi dans son caractère innovant loin de l’image de repli sur soi qui peut parfois être avancée à son sujet.
Les pionniers de la petite harpe en Bretagne se sont retrouvé dans un tourbillon stimulant, une espèce de laboratoire grandeur nature d’une nouvelle musique possible et d’une culture qui veut être transmise. Parmi eux, les frères Quéfféléants fonde le groupe An Triskell en 1970. Ils se mettent à enseigner la harpe dans les années 80. Acteurs de la nouvelle scène celtique, chercheurs, interprètes, adaptateurs de musiques traditionnelles, ils sont avec d’autres les premiers à composer pour la harpe celtique en Bretagne et crée ainsi un nouveau répertoire enrichissant le précédent.
Elève des frères Quéfféléant dont la pédagogie fut toujours orientée vers l’expérimentation, la transmission orale, le mimétisme et le développement personnel, mon travail consistera tout d’abord à comprendre leur musique par l’analyse de leur répertoire et la recontextualisation de leurs travaux. Devenue moi-même professeure de harpe celtique et musicienne je souhaite profiter de cette réflexion pour étudier et confronter ma pratique. Ce Master est l’opportunité de comprendre qui je suis en tant qu’artiste et en tant que professeure. Ainsi dans un deuxième temps, je souhaite faire un travail d’introspection en m’interrogeant simplement sur mes motivations, mon propre contexte, ma musique et ses influences. Enfin, je chercherai à approfondir les notions d’oralité et d’écriture de la musique. C’est un sujet qui impact particulièrement la harpe qui est autant ancré dans la culture classique et académique que dans la culture populaire des musiques de transmissions orales.
Mon projet artistique se tournera en toute logique vers les enfants et un petit format afin de faire passer un message réconciliant l’écrit et l’oral, abolissant les hiérarchies et les préjuges où illustrations musicales, contes et musiques d’inspiration celtique et improvisée se mêleront avec délicatesse et poésie.